Leurres, résidence à Malbuisson

Pendant 100 jours d’été, le long d’un parcours de 5 kilomètres entre foret de sapins, bords de lac Saint-Point et le village de Malbuisson, des oeuvres et installations des artistes divers étaient à découvrir en totale liberté dans un cadre paysager naturel. Les pièces (des créations originales) ont été inspirés aux artistes par le paysage, les savoir-faire, le terroir, les légendes, l’histoire ou les habitants du coin.

Jean Baptiste Sauvage s’est installé en résidence au chalet avec son ami Michel Gaillot, crique d’art, philosophe, pêcheur qui fabrique des leurres depuis longtemps. Tous les deux ont transformé le chalet en atelier en prise direct avec le lac et se sont consacrés à la fabrication et l’experimentation de leurs leurres.

PETIT TEXTE PROVISOIRE SUR LE RAPPORT DE LA PÊCHE À L’ART

(jetée un quart d’heure avant mon départ du chalet)

De la pêche à l’art il n’y a qu’un pas pour autant, comme le disait Aristote que “l’art – par essence – imite la nature”. Et c’est là dès lors que commence toute l’histoire des LEURRES (leurrer = imiter en faisant “comme si” : comme si c’était non pas une création ou une forme issue de la main et / ou de l’esprit de l’homme, issue de sa faculté d’observation des formes de la nature, ainsi que celle de les reproduire techniquement, mais bel et bien un vrai petit poisson (une proie). De plus, pêcher aux leurres implique également une “action” (ce n’est pas une pêche statique, où l’on attend que le “carnassier” morde) mais c’est une pêche active, ou l’on va chercher le poisson, provoquer son attaque par cette “action” qu’on nomme généralement “l’animation” du leurre. Cette dernière dont les variantes et les techniques sont multiples (voire potentiellement infinies) – impliquant de surcroît une dextérité, ainsi qu’un sens de l’observation relatif d’une part au type de carnassier recherché et d’autre part aux conditions climatiques, saisonnières et environnementales du moment tout comme comportementales du poisson (selon de multiples facteurs, eaux très pêchées, poissons habitués ou méfiants, etc, le but étant de trouver le plus rapidement possible la bonne combinaison, dite “pattern”).

Il est important de préciser ici que tout cela (type d’animation et choix du “bon” leurre (couleur, poids, type de leurre, etc.) ne relève pas à proprement parler d’une science précise mais aussi et surtout de ce qu’à la pêche on nomme “le SENS de l’EAU” ((allant bien au delà de la seule habitude ou de l’expérience : connaissance de tant ces facteurs différents, lecture de l’eau et de toutes les types des postes potentiellement favorables, capacité d’adaptation et imagination, savoir prendre des risques ne pas rester dans les sentiers battus ainsi bien sûr que la “CHANCE” voire la “réussite”, quelque chose qui aurait à voir avec la “passibilité” telle que l’appelle le philosophe Maurice Blanchot, etc…).

Ce qui d’ailleurs – pour en rester là – nous ramènerait (mine de “RIEN”) à la question de l’art qui nous réunit “là”, en ce sens déjà que l’art – au delà du seul fait qu’il est une “technique sans fonction, sans fin, sans but, pas même celle de faire du “beau”, au delà du fait aussi, comme mentionné ci dessus qu’il imite la nature”, relève essentiellement aussi de ceci qu’il est toujours également dans l’acte de “création”, une rencontre et un dialogue avec la matière et les formes de la nature, où comme l’ont avoué nombre des plus grands artistes, beaucoup des leurs créations, souvent même leurs plus grands chefs d’œuvres, relèvent d’accidents (comme il arrive également souvent dans la science, voire Pasteur et la pénicilline…), et dès lors – comme pour la pêche, en particulier aux LEURRES – de la “chance” et du coup de la capacité à savoir en saisir les opportunités comme les “accidents” …

 
MICHEL GAILLOT
14 JUIN 2017 MALBUISSON, FRANCE
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